Hommage à Brigitte Laureau / by Marie Morel

Le vendredi 21 novembre 2014, dans l’après-midi, ma galeriste, Brigitte Laureau, est morte. La galerie B. a fermé définitivement ses portes. Une septicémie foudroyante a emporté en quelques jours Brigitte dans un autre monde. Je l’espère pour elle, un beau voyage… mais me laissant, ici sur terre, complètement triste et désemparée.

Je voudrais rendre hommage à la femme galeriste qui a accompagné ma vie de peintre pendant de si nombreuses années. Ce fut pour moi une très grande galeriste, importante dans ma vie de peintre. Elle était totalement passionnée, toujours à l’écoute et admirative. Je la sentais amoureuse de ma peinture, et elle partageait cet amour avec tous ceux qu’elle croisait. Cet amour allait même au-delà de mon œuvre et se reportait aussi sur moi. J’ai ainsi peint pendant des années avec cet accompagnement fabuleux. Pas un jour sans plusieurs signes de Brigitte, même à distance, des lettres, des coups de téléphone, des messages, des courriels. Elle accompagnait chaque instant de ma vie. Nous avions des discussions interminables sur l’art, sur nos projets, sur nos vies, sur nos métiers, elle galeriste et moi peintre. Cela continuait quand nous nous voyions, chez moi, chez elle ou ailleurs. Elle était visionnaire, totalement sûre de mon parcours, c’est comme si elle savait que, à chaque nouvelle œuvre c’était acquis dans son cœur.

Il n’y a jamais eu aucun doute, et elle accompagnait ma vie de peintre avec la même certitude que j’avais à peindre. Pas un instant elle n’a douté de moi. C’était ma meilleure alliée. C’était une grande galeriste aussi car elle savait vendre, cela faisait partie de son métier, c’était une passion, un jeu aussi. À chaque vente, aussitôt elle m’appelait, même quand c’était les œuvres des autres artistes de sa galerie. Elle avait besoin de partager avec moi chaque victoire. C’est vraiment le mot : une victoire ! Puis aussitôt, elle repartait à « la bataille ». Elle vendait parce qu’elle aimait, elle savait expliquer son amour d’une œuvre, le partager, l’offrir à la personne qui passait. Elle transmettait, jusqu’à ce que le collectionneur devienne aussi passionné qu’elle. Elle vivait pour cela.

Elle m’a beaucoup appris sur son métier. Elle était fière de sa galerie. Elle tenait bon. C’était pour moi une grande galeriste, car grâce à elle je n’étais pas seule. Dans la solitude de mon atelier je savais toujours qu’elle était là, qu’elle comprenait mon engagement, mon énorme travail, les sacrifices que je m’imposais pour lui. Elle était si fière de moi que je me sentais épaulée. Elle sait que je vais continuer sans elle, avec la même puissance, je n’ai que ça à lui offrir en mémoire, continuer au-delà de ma peine.

Marie Morel